Telepéages routiers et tarification des poids lourds

       Le Grenelle de l'environnement encore tout chaud, le CNR (Comité National Routier, organisme para-public dont la fonction principale est d'évaluer presque en temps réel les coût de revient du transport routier) a sorti un rapport, « Mise en place du télépéage poids lourd

Incidences sur les coûts du transport routier de marchandises de lots en France », sur les implications et les enjeux du péage poids lourds, une des pistes d'action issue du Grenelle. Rapport qui fait le point sur la complexité insoupçonné du dossier. Depuis la directive 2004/52 (interopérabilité des systèmes de télépéages routiers en Europe) et la directive Eurovignette 2006/38 (taxation des poids lourds pour l'utilisation de certaines infrastructures), il existe un nouveau cadre législatif pour taxer les poids lourds sur les infrastructure du RRTE (Réseau Routier TransEuropéen), en particulier les autoroutes.

        Autoroute dont l'utilisation par le transport routier par lot est de plus en plus ressentie comme indispensable : « La multiplicité des points de chargement et de livraison, ainsi que les modalités commerciales, contraintes ou pas par les impératifs du juste à temps, rendent incertaine la pertinence d'un recours systématique à l'autoroute. ». On peut ajouter que de nombreux opérateurs utilisent maintenant les aires d'autoroutes comme de véritables hubs, où par exemple deux chauffeurs routiers s'échangent leur remorque à mi-chemin du trajet des marchandises, pour pouvoir faire l'aller retour dans la journée.

       

        Que disent ces directives ? Grosso-modo que les différents systèmes de péages européens doivent être compatibles et que la tarification de ces infrastructures doit être calculée selon les coûts générés (entretien, effets environnementaux, congestion…) par le transport.

        Et cela n'a rien d'évident. Comme le relève le CNR, en Europe, coexistent deux systèmes de redevance (la redevance au kilomètre, comme en Allemagne, et le péage routier, comme en France) et deux technologies (Satellite en Allemagne, micro-onde en France). Toutes ces technologies devraient être rassemblées dans un boîtier unique, l'OBE ("On Board Equipment"), ce qui apparemment est difficile à mettre en pratique. Cette non-opérabilité pourrait alors constituer une sorte de barrière à l'entrée pour certains réseaux (notamment l'Allemagne)

        Peut-être encore plus problématique pour les entreprises de TRM (Transport Routier de Marchandise), la directive eurovignette devrait rendre illégale la tarification actuelle des sociétés autoroutières. Celles-ci accordaient des rabais commerciaux importants à leurs plus gros clients. Or, ces rabais seront limités à 13% (alors qu'ils atteignent couramment 25% aujourd'hui), et ne pourront dorénavant n'être attribué qu'à des véhicules (et non plus à l'ensemble des véhicules d'une société) dépassant un certain montant de péage. Bref, de tous ceci, le CNR calcule (et détaille très finement) une hausse du tarif effectif des péages pour les usagers régulier de l'autoroute (de 25% d'ici à 2008 pour un utilisateur fréquent longue distance !). Ainsi le prix de l'autoroute pourrait ne plus être négligeable, par rapport aux bénéfices qu'elles apportent aux transporteurs (fiabilité, sécurité, vitesse plus grande donc moins de coûts salariaux…)

       

        Aussi, pour le CNR, « Il n'est donc pas irréaliste d'envisager une érosion des trafics PL sur les réseaux autoroutiers payants », et un transfert vers le réseau secondaire, ce qui pourrait générer des coûts pour la collectivité (perte de fiabilité du transport routier, hausse des accidents…). Pour autant, le CNR reste sceptique sur un éventuel transfert modal vers le rail : « une étude réalisée par TransCare Ag, cabinet spécialiste du transport ferroviaire, montre que le volume transporté par rail est peu élastique avec le prix des péages autoroutiers : 1€/km d'augmentation de péages n'entraînerait que 1% de transfert maximal de volume transporté de la route vers le rail. L'amélioration des qualités de service et la meilleure utilisation du réseau représentent, à n'en point douter, des facteurs plus efficaces de développement du rail que la tarification croissante de certains réseaux routiers. »

 

        Cela dit, sans avoir fait d'étude économétrique, il semble bien que le transport routier, qui bénéficie actuellement selon les syndicats du secteurs d'une pénurie de tracteurs, d'une pénurie de chauffeur, et qui répercute sur les chargeurs automatiquement tous les surcoûts due à l'augmentation du gazole, a les moyens de supporter cette hausse, et de la répercuter sur les chargeurs, en continuant d'utiliser l'autoroute, qui justement économise le matériel et le personnel. Enfin, c'est une impression personnelle.

Par contre, cela laisse une question sans réponse : qui va récupérer la hausse des péages effectifs ? Si c'est les sociétés autoroutières privés, l'UE s'est mis le doigt dans l'œil !



16/11/2007
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 20 autres membres