Les alternatives au fret routier : les innovations arrivent !
La semaine consacrée au transport dans une grande école française a été l'occasion de découvrir les récentes avancées des techniques intermodales, visant à remplacer les camions par un autre mode sur une partie du trajet.
Le thème est d'actualité, avec l'engagement récent du gouvernement d'augmenter de 25 % d'ici 2012, pour le fret, la part de marché des modes de transports moins polluants. L'objectif peut sembler ambitieux, et surtout très rapproché, vu la grande inertie du secteur. Toutes les expérimentations qui nous ont été présentées ont mis plusieurs années à se concrétiser. Mais on nous a présenté ainsi quelques belles réussites.
Ainsi le port de Gennevillier, à l'agonie il y a seulement quinze ans, dont les acteurs publics se disputaient le terrain pour en faire des logements, est aujourd'hui une affaire relativement florissante. Les conteneurs amenés du Havre par la Seine induisent une activité intense. Le transport fluvial est certes lent, mais ce n'est pas forcément rédhibitoire pour les logisticiens , qui peuvent s'en servir comme stock flottant. Autre petit avantage, cela permet de payer les frais de douane au déchargement à Paris, soit 36 heures plus tard. Un plus grand intérêt pour les chargeurs serait peut-être les voies de chemin de fer qui arrivent juste au port. Pas vraiment utilisées au maximum de leurs possibilités, elles permettent notamment à Monoprix de faire livrer ses conteneurs jusqu'à son entrepôt de Bonneuil.
Monoprix, par sa filiale logistique, la SAMADA, se distingue également en matière de transport de fret par son utilisation du rail en région parisienne. Profitant de la disponibilité des voies du RER une partie de la nuit, Monoprix peut livrer par train certaines marchandises (une faible partie du total) directement à son entrepôt parisien. Monoprix espère améliorer son image et a obtenu un très bon emplacement près de Bercy, pour compenser le surcoût du transport.
La congestion en région parisienne favorise l'innovation, mais l'entreprise MODALOHR voit plus large. Il s'agit de transporter par train les remorques de camion entre Luxembourg et Perpignan. Le principal écueil du transport intermodal, les difficultés de transbordement, est ici résolu par un ingénieux système de wagon pivotant et de quai surélevé. La ligne démarre tout juste, mais MODALOHR espère déjà constituer un réseau européen. Le gros problème est ici d'obtenir des sillons ferroviaires, pour emprunter des voies déjà congestionnées en certains points, et où la priorité était donnée jusqu'ici au transport de passager.
Bref, si on ne peut que se féliciter du surcroît d'innovation dans le secteur, la part modale de la route n'a pour l'instant pas trop de souci à se faire. D'une part parce que l'écrasante majorité des déplacements en camions se font sur une courte distance. D'autre part parce qu'à longue distance, un report modal important nécessiterait des investissements colossaux pour construire des infrastructures dédiées. Ainsi la Communauté européenne du rail (c'est un lobby d'industriel du rail, et non une institution européenne) estime à 145 milliard d'euros l'investissement nécessaire sur 6 corridors principaux pour faire passer la part du fret ferroviaire de 17 à 22%.