Les Opérateurs Ferroviaires de Proximités
Le monde du 17 octobre revient sur la crise actuelle du fret à la SNCF, dans un très bon article de Dominique Buffier. Malgré les réorganisations et les plans de relance (notamment « une aide de Bruxelles de 1,4 milliards d'euros » [il faudrait vérifier, mais ce doit plutôt être « une aide autorisée par Bruxelles »]), l'activité fret de la SNCF décline, passant de 55 à 41 milliard s de tonnes kilomètres transportées en seulement 5 ans.
La réorganisation de l'activité fret depuis 2000, qui a conduit à fermer de nombreux lignes et dépôts par trop déficitaire, et à se concentrer sur les axes de flux massifs (pour y apporter notamment une meilleure qualité de service), explique certes en partie cette évolution. Mais cette politique a conduit à privilégier les gros chargeurs, au détriment de ceux qui ne confient pas assez de marchandise pour remplir un train entier : on parle alors d'envois en « wagon isolé ».
Or, avec l'évolution de la logistique, et notamment les politiques visant à réduire au maximum le stock (le stock peut être vu comme un capital immobilisé et improductif), les entreprises ont plutôt tendance à recourir à des envois de marchandises plus petits et plus fréquent. La stratégie de la SNCF est ainsi mis en défaut, comme l'affirme Christian Rose, de l'AUTF (Association des Utilisateurs de Transport de Fret), dans Le Monde : « Le modèle du train de fret, constitué de plusieurs dizaines de wagons, réalisant des trajets réguliers et transportant des volumes identiques, ne correspond plus à l'attente des industriels ». Pour concilier la volonté de la SNCF de développer des axes majeurs de flux, procurant une bonne fréquence à un coût acceptable, et les exigences des chargeurs, notamment ceux situés dans des régions à l'écart de ces flux, il faudrait pouvoir regrouper les flux émiettés des chargeurs pour créer des trains complets.
C'est ici qu'intervient l'Opérateur Ferroviaire de Proximité (OFP), déjà existant dans certains pays (Europe du Nord, Amérique du nord), et dont un projet pilote vient d'être lancé en région Centre, Proxirail. Ce concept était défendu par Jacques Chauvineau dans un rapport au ministre du transport de septembre 2006 (page 8 et 9).
Cet opérateur devrait proposer des services plus adaptés aux besoins du milieu économique local (il s'agit ici de "remettre le chemin de fer à l'endroit" selon Jacques Chauvineau, et d'organiser l'offre selon la demande et non plus l'inverse), et bénéficier d'une moindre concurrence du trafic de voyageur sur des infrastructures ferroviaires locales délaissées par la SNCF. Cependant ces infrastructures nécessitent justement souvent des travaux d'entretien et de remise aux normes onéreux (30 millions à la charge de l'Etat et de la région Centre), pour un succès aléatoire, vu le contexte du rail français. Ces OFP ne peuvent en effet réussir que s'ils sont liés à un réseau ferroviaire longue distance performant….