TLF fait le point sur le transport routier et l'environnement

A quelques jours de l'examen de la loi Grenelle, TLF  publie ce qui ressemble à un plaidoyer pour le transport routier, un rapport qui fait le point sur le transport routier, vu sous l'angle du développement durable (voir le communiqué de presse-résumé).  L'occasion de faire le point sur la question, et sur les progrès indéniables du transport routier en la matière. Mais le problème est que le seul domaine où le transport routier ne s'améliore pas, est aussi celui qui concentre les enjeux environnementaux et énergétiques du XXI ème siècle.

 

Selon TLF , l'environnement tend à devenir une composante importante de l'activité des transporteurs logisticiens, du fait de la pression sociale, mais aussi, un peu plus étonnamment, du fait d'une demande des chargeurs, à l'origine d'appels d'offres contenant de plus en plus des exigences environnementales.

  Mais le développement  durable, ce n'est pas seulement l'environnement, mais aussi le social et l'économie. Sur le plan social, TLF met l'accent sur un accès à la formation supérieur dans le secteur du transport et de la logistique que pour le reste de l'économie, mais les salaires restent plutôt faibles : 18 000 € dans le transport, et 20 000 € pour la logistique (contre 22 000 € pour l'ensemble de l'économie). C'est d'ailleurs assez étonnant, vu que les routiers ont en général de « bons » salaires (du moins dans l'absolu, car c'est au prix d'un temps de travail très important : 200 heures par mois en général !), contrairement aux caristes qui travaillent dans les entrepôts et font les 35h.

Sur le plan économique, le fait impressionnant, c'est la perte de compétitivité à l'international. Le sujet est bien sûr très sensible. En prenant le cas le plus défavorable (TLF n'est bien sûr pas impartial dans sa présentation, mais s'appuie sur des chiffres fiables a priori, issus de la recherche publique), le trafic de transit (un transport Bruxelles-Barcelone, par exemple), on voit que la part du pavillon français a quasiment disparu en moins de 20 ans, passant de 6 à 0.5% (mais on partait d'un chiffre faible, je ne suis pas sûr que ce soit si significatif que ça).

Ce qui doit être plus significatif, c'est  le trafic international, où le pavillon français représente encore 20% des échanges, mais est minoritaire face à tous les autres pays européens de l'ancienne Europe des 15. Si la défaite est écrasante dans le match qui oppose la France à la Pologne (94% à 0 !), même face aux anglais on perd d'une courte tête (39% pour le pavillon anglais contre 38% pour le pavillon français, et le reste pour d'autres pays), et dans tous les autres pays le pavillon français est à la traine, souvent de manière très marquée.

 

On arrive aux externalités du transport. Au niveau des accidents, TLF se félicite d'une moins forte implication des camions, dont le taux d'accident a diminué de 50% depuis 1994, et qui sont impliqués dans seulement 6% des accidents (contre 15 à 20% du trafic). Par rapport à la situation de 1986, cela représente 1000 vies sauvées par an. Il faut toutefois remarquer que le nombre général d'accident a globalement diminué pendant cette période,  mais dans des proportions moindres.

 

Le gros point noir, c'est le niveau climatique. Au niveau du Co2, si les émissions des transports routiers ont augmenté sensiblement (+27%) depuis 1990, la date référence de Kyoto, on peut se consoler en considérant que le Co2 émis par tonne-kilomètre transportée a diminué de 9% dans la même période, marque sans doute de camions aux moteurs plus efficaces, mais surtout plus gros (en général en transport, plus le moyen de transport est gros, moins il consomme à la tonne de marchandise  transportée). Mais cette diminution relative est quand même très faible, d'autant qu'on transporte beaucoup plus, et qu'on devrait continuer à transporter plus dans les années à venir.

Heureusement, pour les polluants locaux, la situation est bien meilleure, avec les camions  aux normes EUROS qui se sont démocratisés. Cependant il reste encore pas mal de camions très polluants (15% des camions sont des EURO 1 ou moins) et fin 2006, les derniers modèles de camions EURO IV et EURO V étaient encore très rares (2% du total des tracteurs). Un rapport de l'EEA montrait dernièrement que, pour de nombreux polluants locaux[i] , le transport routier restait la première source d'émissions, même si ce secteur fait des progrès rapides. Page 11 du rapport de TLF, on voit que depuis 1990, les émissions (brutes, pas rapportées au kilomètre) du transport routier ont quasiment disparu pour le souffre, et ont diminué de moitié pour les NOX et le CO. Concernant les composés volatils et les particules, les progrès existent (-25,-30%) mais sont moins flagrants.

 

En fin de rapport, les entreprises s'engagent à améliorer leurs pratiques, même si il n'y a pas d'engagements et d'objectifs chiffrés. A noter que pour faire face à la pénurie de conducteurs, les entreprises s'intéressent aux anciens militaires et aux jeunes des « quartiers ». Bref, du bon lobbying, qui ne traverse jamais la ligne rouge (voir un contre exemple avec l'IRU).  Tous ces faits ci-dessus sont connus, mais gagnent à être précisé et rassemblés. Alors que le monde politique semble hésiter (voir transport actualité) au sujet de la future taxe kilométrique, cela pourra t-il peser ? Je ne pense pas. Pour le CO2, les choses ne s'améliorent pas, et ne s'amélioreront pas dans un avenir proche vu les tendances actuelles. Si on peut douter de l'efficacité de la taxe kilométrique à ce sujet (voir le point de vue de Patrice Salini dans l'article précédent), il faudra bien faire quelque chose…



[i] Les Nox, les composés volatils, et le monoxyde de carbone. Pour les particules, le transport routier est « seulement » deuxième.



08/10/2008
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