Le nouveau plan d'action fret de la commission européenne

           Depuis quelques temps, et notamment l'examen à mi-parcours du livre blanc sur les transports de 2006, la commission européenne est devenue plus raisonnable en matière de transport de fret. Consciente des limites de son action (voir article précèdent notamment) et des impératifs économiques des chargeurs, comme de la grande inertie du secteur, elle a abandonné les objectifs très ambitieux du livre blanc de 2001, qui appelait de ses vœux un report modal important de la route vers les modes alternatifs et même à un découplage de la croissance économique et de la croissance en transport (faire en sorte d'avoir de la croissance économique, sans avoir de croissance du volume de marchandise transporté).

 

            Pour autant, l'Union Européenne n'en reste pas moins décidé à peser sur le transport de fret européen, en témoigne le dernier « Plan d'action pour la logistique du transport de marchandises », communication provisoire de la commission européenne, qui détaille les futures action européennes dans le domaine dans les années à venir.

 

            Dans le domaine des STI (Système de Transport Intelligents), l'UE vise notamment à uniformiser les systèmes développées pour les différents modes, pour pouvoir suivre sans problème un transport intermodal, et ainsi élaborer une norme commune d'ici 2010. Plus particulièrement, l'UE veut uniformiser les systèmes de péages routiers.

            Dans le domaine de la formation, pour lutter contre la pénurie de main d'oeuvre du secteur, l'UE veut oeuvrer pour une reconnaissance mutuelle des diplômes et pour améliorer l'attractivité du secteur de la logistique. Suivent de nombreuses propositions liées à de meilleurs indicateurs, des processus de benchmarking, d'outils d'évaluation statistiques…

 

            Peut-être de façon plus cruciale, la commission s'engage à « établir une fenêtre unique (point d'accès unique) et un guichet unique pour les procédures administratives dans tous les modes. » d'ici 2012 au plus tard et à « Formuler une proposition législative sur la simplification et la facilitation du transport maritime à courte distance en vue d'un espace de transport maritime sans barrières. » dès 2008. On ne peut que se féliciter de la relative rapidité que promet la commission.

            Dans la même veine, la commission réfléchit à un « document de transport unique pour tous les transports de marchandises, tous modes confondus », et promet une proposition législative dès 2009, et veut travailler sur la responsabilité juridique, en cas de transport intermodal, impliquant des acteurs nombreux et des pratiques contractuelles différentes.

            Tout ceci n'est pas forcément très spectaculaire mais pourrait aider à diminuer les coûts de friction causés au transport intermodal par les barrières non-physiques, et donc rendre plus compétitif ce dernier.

 

            Autre chantier crucial, le gabarit des véhicules et les normes de chargements. Ce sujet a déjà suscités des polémiques sur l'EMS (Système Modulaire Européen, ça sonne mieux que le « méga-trucks »). A ce sujet, la commission noie finement le poisson, avant d'appeler à « Étudier les options de modification des normes applicables aux poids et aux dimensions des véhicules et évaluer la valeur ajoutée d'une mise à jour de la directive 96/53/CE [directive fixant les dimensions maximales autorisées en trafic national et international et les poids maximaux autorisés en trafic international] » C'est tellement ampoulé que ça doit vouloir dire, de plus gros camions autorisés à moyenne échéance (ça expliquerait la réaction plutôt positive de l'IRU (International Road Union) : « The IRU is encouraged by the priorities set out in the EU Commission's Freight Transport Logistics Action Plan. The document recognises that modern societies cannot survive or achieve sustainable development without efficient logistics chains and that the best way to achieve this is to give industry the means but also the freedom to attain them." )

            D'un autre côté, l'UE semble vouloir ressusciter le concept d'Unité Européenne de Chargement Intermodale (en très simplifié, il s'agit de concilier l'intermodalité des conteneurs, et la meilleure adaptation des caisses mobiles aux formats des palettes européennes, dans un nouveau format de « boites » de chargement), en jachère depuis 2004. Mais imposer un nouveau type d'unité de chargement est très difficile… Dans la même veine, la proposition de favoriser la multimodalité des unités de chargement aérienne semble assez anecdotique, vu la faible importance du mode aérien, et du fait qu'il paraît difficile d'envisager que les envois de marchandises  par avion (peu volumineux, à haute valeur ajouté, nécessitant un transport rapide…) transitent ensuite par un autre mode que le routier...

 

            Enfin, si la commission se demande «  s'il ne serait pas souhaitable d'adopter des critères plus stricts applicables aux véhicules, à leur équipement et aux conducteurs, ainsi que des restrictions concernant le choix de l'itinéraire. », elle ne se risque pas à programmer des mesures concrètes [voir à ce sujet la polémique en cours sur le transport de matière dangereuse]. Ça aussi, ça doit expliquer la bonne humeur de l'IRU. Mais après avoir été déraisonnablement ambitieuse, la commission n'est t-elle pas trop timorée ?

 



23/10/2007
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